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« Le Messager », M. Hervé (2017)


Ce tableau aux timbres vifs et violents représente la cristallisation de souvenirs de guerre et d'une mémoire collective en reconstruction.

L'élaboration de la peinture.

Pour l'élaboration de cette peinture, M. Hervé utilise un procédé incongru : le dessin au couteau. Une fois la toile découpée finement à vif et les formes de l'œuvre future fixées, il enduit la toile avec de la peinture à huile.

Notant également le traitement de la surface picturale, raclée sur plusieurs couches. Cela permet de donner un aspect massif à l'œuvre.

L'œuvre et sa signification.

> Le crépuscule

Le choix d'une scène qui se déroule au soleil couchant constitue la toile de fond de la mise en scène et a un fort pouvoir d’évocation. Car il permet au spectateur d’appréhender avec plus de facilité l’aspect irréaliste du tableau.

Dans un sens imagé, le coucher du soleil, et donc l'arrivée imminente de l'obscurité, est ici associé à la perte de lueur d'espoir, qui on le verra plus loin, est ravivée par la présence de la foule.

> La déshumanisation des traits du personnage central

Figure d'une divinité inquiétante et menaçante issue des cultes religieux locaux, le personnage surgit, menaçant, au milieu d'une foule de femmes. La centralité de cette figure met en exergue la problématique de l'animalité de l'homme. Cela ne signifie nullement que l'homme est foncièrement doté de mauvaises intentions mais que le pessimisme anthropologique est une réalité en Centrafrique. Dans un pays où la loi du plus fort bat son plein, cela conduit l'homme à se comporter en monstre et à ne pas valoriser la vie de l'autre, au nom d'une convoitise illimitée des biens.

> Les sujets féminins

Bien que visibles, les visages des femmes ne nous apparaissent que furtivement. L'effet de « transparence », qui contraste avec la présence des silhouettes fantomatiques atteste de la disparition, de l'effacement de l'identité de ses femmes.

Les premières victimes des conflits et guerres ont toujours été les femmes. Faire fi de leur existence dans ce tableau est un moyen poignant d'en témoigner.

> La foule

La foule retient particulièrement l'attention puisque c'est le lieu où se manifeste la présence de l'autre et du monde extérieur. Il faut également se souvenir que toute émancipation progressive naît à travers des compositions de groupes.

Ainsi, en observant la posture du groupe et l'expression calme qu'elle transmet, une certaine lueur d’espoir naît de cette foule qui loin de s'opposer dans l'altérité donne l'illusion de s'agencer pour faire face au danger imminent.

> Les corps

Les corps longilignes et amaigris rappellent les sculptures africaines

> Rouge

Le rouge captivant est ici utilisé comme couleur dominante. Ce qui est intéressant est l'utilisation du rouge, et non du noir, comme couleur d'obscurité afin d’accentuer le sentiment d’inquiétante étrangeté.

La dimension allégorique que ce tableau peut revêtir est l'image d'un pays à feu et à sang.

Lier l'art au vécu.

À l'image des écrivains, une œuvre trouve son sens à travers la vie du peintre.

En cela elle permet à l'artiste de se révéler à lui-même. De même opérant à la manière d'un catharsis, l'œuvre libère l'artiste et le regardeur d'un passé traumatisant.

M. Hervé est né et a toujours vécu en Centrafrique. Comme la majorité de ses compatriotes, il a vécu les multiples mutineries et guerres civiles.

C'est devant une boulangerie que j'ai fait sa connaissance essayant tant bien que mal de vendre ses créations et racontant à qui veut l'entendre ses différents périples.

Sa démarche artistique consiste à montrer en quoi la violence extrême des guerres civiles, notamment le fait de certains groupes armés d'attaquer munis de machettes une partie de la population, a des conséquences irréversibles sur les droits de l'humain et la reconnaissance de la liberté de l'autre d'exister dans sa différence.

C'est une manière personnelle de faire son témoignage et d'apporter son point de vue sur les différents conflits qu'a connus le pays.

Andrew Doyle a écrit dans un article paru dans Spiked : « Dans notre monde parsemé de dangers, les musées sont des phares de culture et d'optimisme ».

Notamment dans un pays comme la Centrafrique ravagée par des années de guerres civiles qui ont profité au pillage des musées, les jeunes artistes sont tributaires d'un optimisme selon lequel la culture peut être une force puissante en faveur de la paix et de la réconciliation nationale.

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